lundi 28 avril 2014

Traditions juives et chinoises


TRADITIONS JUIVES ET CHINOISES              JP Derrida
                                                                       


Le peuple juif est numériquement peu important avec seulement 14 millions de personnes et les Chinois sont environ 100 fois plus nombreux mais ces deux peuples ont su remarquablement préservé pendant plus de 25 siècles leur spécificité et leurs traditions.
Il y a dans les deux cas  un sentiment très fort d’identité et un respect de la culture ancestrale avec le souci majeur de la transmission. Les livres classiques ont été la référence en Chine et le Judaïsme est centré sur la Bible et ses commentaires.
 Trois sources de sagesse ont contribué à structurer la pensée chinoise en s’associant plutôt qu’en s’opposant : Laozi à l’origine du taoïsme, Bouddha  et surtout Confucius (551 – 479 avant JC) qui reste le maître  le plus emblématique. Ses paroles rapportées dans les Entretiens de Confucius(EC) nous serviront souvent de référence. A peu près à la même époque , la pratique du judaïsme se codifiait en exil à Babylone et un édit du roi  de Perse Cyrus (538 avant JC) permettait aux juifs exilés de retourner dans leur pays.
 Nous n’ envisagerons pas ici le cas de la Communauté des Juifs chinois de Kaifeng installée en Chine à partir du neuvième siècle après JC, donc bien après la codification des traditions juives et chinoises. Notons cependant que cette communauté  relativement isolée a vécu plus de 1000 ans en Chine  et est parvenue  à la fois à préserver son identité et à faire une étrange synthèse entre judaïsme et confucianisme.
Le Judaïsme et la sagesse chinoise  sont à l’évidence spirituellement très éloignés mais  il existe aussi quelques convergences , que nous allons essayer de développer
et qui expliquent peut-être la pérennité de leur message.



1 L’HEBREU ET LE CHINOIS . LES TEXTES FONDATEURS

L’Hébreu et le Chinois font partie non seulement des langues les plus anciennes au monde  mais  sont aussi deux langues qui ont aussi  relativement peu évolué .Le Chinois continue aujourd’hui à emprunter beaucoup d’expressions à la langue qu’utilisait Confucius au 5è siècle avant JC . L’Hébreu moderne est en continuité directe avec l’Hébreu biblique  remontant  au début du 1er millénaire avant JC. Un enfant israélien peut ainsi  aujourd’hui arriver à comprendre les textes les plus récents de la Bible comme le livre  d’Esther ou le livre de Jonas sans pratiquement avoir recours à un dictionnaire .
La culture chinoise est essentiellement véhiculée par 9 livres classiques :   Shijing ( Poésie), Yijing  ( mutations ou divinations ), Liji (Rites), Chunqiu(Annales des printemps et automnes, Première chronique historique),Shujing (Livres des discours et des écrits),Lunyu (Sentences de Confucius),Zhong yong (L’invariable milieu , recueil de Confucius) , Daxue (La grande Etude, recueil également de Confucius) et Mengzi (Œuvre du philosophe confucéen Mencius).
Les lettrés,candidats aux fonctions administratives mandarinales , devaient parfaitement connaitre le contenu de ces livres   . La langue chinoise et ces livres classiques ont permis d’assurer la perpétuation de la civilisation chinoise à travers des épisodes très mouvementés de son histoire .
De façon à peu près équivalente , la Bible et l’Hébreu ont contribué à assurer la continuité et la fidélité du peuple juif malgré toutes les tourmentes de l’histoire.







2 CALENDRIER LUNI-SOLAIRE : UNE ANNÉE DE 13 MOIS LUNAIRES 7 FOIS TOUS LES 19 ANS

Les calendriers traditionnels juifs et chinois sont les seuls  calendriers luni-solaires actuellement utilisés.
Le jour et l’année sont des unités de temps basées sur le soleil et le mois une unité de temps basée sur la lune. Une lunaison dure 29,53 jours et l’année lunaire comporte 6 mois de 30 jours et 6 mois de 29 jours. 12 lunaisons correspondent à 354 jours et il y a donc un décalage d’environ 11 jours  entre une année de 12 mois lunaires et une année solaire.
Or dans le calendrier liturgique, il est très important que les fêtes correspondent aux saisons . La Pâque juive doit toujours  avoir lieu au début du printemps, lors de la pleine lune ,le 15  du mois lunaire de Nissan (entre le 26 mars et le 25 avril) et le nouvel an juif ,  le 1er  du mois lunaire de Tichri au début de l’automne (entre le 5 septembre et le 5 octobre). De la même façon le nouvel an chinois est célébré en hiver(du 21 janvier au 20 Février) et la fête de la  lune de la mi-automne le 15è jour du 8è mois( du 8 Septembre au 6 octobre ).  Le calendrier musulman est par contre purement lunaire avec un décalage de 11 jours sans synchronisation des fêtes sur les saisons .
Le calendrier hébraïque et le calendrier traditionnel chinois sont luni-solaires avec 12 mois  lunaires auxquels se rajoute certaines années  un mois supplémentaire(année embolismique) permettant de resynchroniser  les calendriers solaire et lunaire . Meton, astronome et géomètre grec du Vè siècle avant JC, a donné son nom à ce calendrier luni-solaire mais il était très probablement déjà connu en Chine et à Babylone. 19 années solaires correspondent à 235 lunaisons.  Un  mois est  donc rajouté    7 fois sur un cycle lunaire de 19 ans aussi bien dans le calendrier hébraïque que dans le calendrier chinois. Le calendrier hébraïque ,  définitivement mis en forme en 359  avant JC , ajoute après le 6è mois de l’année Adar , le mois de Véadar les 3è, 6è, 8è,11è, 14è,17è et 19è années du cycle lunaire de 19 ans . Le mois supplémentaire  chinois (Run yue) s’intercale à un moment plus variable de l’année  après le 3è,4è,5è,6è ou 7è mois régulier.



3 ETUDE ET TRANSMISSION

Dans les deux traditions, l’étude et la transmission occupent une place essentielle.
Confucius fonda la première école privée du monde . « J’offre mon enseignement à quiconque me rémunère ne fût-ce que d’un simple cadeau de viande séchée », cadeau modeste et purement symbolique . A cette époque ,  seuls les fils de nobles avaient accès à l’instruction et Confucius transgressa ce principe en affirmant que son enseignement s’adressait à tous sans aucune discrimination . Confucius voulait former une élite intellectuelle  sans prendre en compte l’ origine sociale.
A propos de l’enseignement ,Confucius disait : « Si vous refusez d’instruire un homme qui a les capacités requises, vous perdez un homme mais si vous essayez d’enseigner un homme qui n’a pas les dispositions nécessaires ,vous perdez vos instructions. Un sage ne perd ni les hommes ni ses enseignements (EC15,8) ».
Une de ses idées essentielles était que l’être humain était perfectible et l’étude fondamentale :
«  Jamais on ne doit cesser d’étudier » (Xunzi 1) .
«  Du fils du Ciel au simple particulier, tous s’appliquent à ce seul et unique but :  perfectionner leur propre personne » (Daxue 1a)
« Le vrai savoir, c’est de reconnaître qu’on sait ce qu’on sait et qu’on ne sait pas ce qu’on ne sait pas ».( EC 2,17) . Socrate dira quelques décennies plus tard à peu près la même chose : «  Celui qui sait qu’il ne sait pas, sait plus que celui qui croit savoir . »
Chen Ziqin demanda au fils de Confucius si son père lui avait donné un  enseignement particulier . « Non, répondit-il  .  Une fois, comme je traversais discrètement la cour, il me demanda si j’avais étudié les Poèmes et me dit que sans étudier les Poèmes , je ne saurais jamais m’exprimer. Une autre fois , comme je traversais discrètement la cour , il me demanda si j’avais étudié les Rites et me dit que sans étudier les Rites , je ne saurais jamais me tenir. Tels sont les 2 enseignements qu’il m’a donnés ». Chen Ziquin se retira et dit tout joyeux : «  J’ai demandé une chose et j’en ai appris trois. J’ai appris quelque chose sur les Poèmes, j’ai appris quelque chose sur les Rites et j’ai appris qu’un honnête homme garde ses distances avec son fils » . (EC 16,13)
L’enseignement des enfants occupe également une place essentielle dans le judaïsme. « Tu enseigneras la Torah à tes enfants et aux enfants de tes enfants ». (Deutéronome4,9) . La priorité de l’enseignement est tel que dans  le Talmud ( Chabath 119,b) il est dit  que « le monde n’existe qu’à travers le souffle des écoliers » et que « nous n’avons pas le droit de suspendre leur instruction , fût-ce pour reconstruire le temple ».  Initialement c’était le père qui était tenu de s’occuper de l’instruction de ses enfants mais l’orphelin  risquait alors de ne bénéficier d’aucun enseignement .Josué ben Gamla proposa que des instructeurs soient nommés dans chaque ville pour assurer l’instruction des enfants dès l’âge de six ans .
Hillel disait : «  Celui qui n’ajoute pas à ses connaissances, les diminue. Celui qui ne cherche pas à s’instruire n’est pas digne de vivre ».(Maxime des Pères 1,13) 






4 IMPORTANCE DU RITE

Le rituel composé de gestes, d’objets de culte, de devoirs ou d’interdits peut paraître contraignant, surtout dans un monde qui se défait de plus en plus de la contrainte au profit de la satisfaction individualiste. Il reste cependant évident que la transmission d’une génération à l’autre passe beaucoup plus par le partage d’un vécu que par l’enseignement de lois et de principes .
Confucius dégage le rite  de toute idée superstitieuse ou intéressée et le considère comme un accomplissement de l’homme . «  L’homme de vertu est celui qui s’efforce de revenir aux rites ». «  Ne regardez, n’écoutez, ne dites rien, ne faites rien, de contraire aux rites » .  (EC 12 ,1) . « L’honnête homme se base sur la justice, agit selon les rites, s’exprime avec modestie et conclut de bonne foi. »(EC15,18)
Il y a dans la tradition chinoise trois types de rites fondamentaux : ceux liés à la naissance et à la mort qui rappellent à l’homme sa condition passagère ,ceux dédiés à la terre et au ciel qui inscrivent l’être humain dans un axe vertical entre les deux et  ceux en rapport avec le culte des ancêtres qui sont la marque la plus profonde de la culture chinoise.
Le respect des rites est également essentiel dans le judaïsme si bien que certains considèrent que la tradition est parfois supérieure à la loi et que la pratique religieuse est une priorité par rapport à la connaissance précise  du dogme  religieux.




5 RESPECT DES PARENTS ET DE LA FAMILLE

Le respect dû aux parents est dans les deux traditions primordial et prioritaire.
Dans un paragraphe des Entretiens, le gouverneur She dit à Confucius : « Chez nous, il y a un homme d’une droiture inflexible ; son père a volé un mouton et il l’a dénoncé » . Confucius lui répondit : « Chez nous , nous avons une autre conception de la droiture :  le père protège son fils et le fils protège son père. Voilà notre façon d’être droits » (EC 13,18) .La piété filiale l’emporte donc sur le principe général . Entre ma mère et la justice , je choisis ma mère dira plus tard Camus.
Le devoir naturel de la piété filiale consiste à nourrir et entretenir ses parents devenus  vieux  mais ne s’arrête pas là . « De nos jours, quiconque assure la subsistance de ses parents passe pour un bon fils. Mais on nourrit bien aussi les chiens et les chevaux ; à moins d’y mettre du respect où donc est la différence ? » (EC 2,7)  Le fils doit toujours s’inquiéter de la situation et la santé de ses  vieux parents et certaines paroles de Confucius restent d’une étrange modernité:
« Du vivant de vos parents, n’entreprenez pas de longs voyages ou si vous voyagez , vous devez laisser une adresse »(EC 4,19).
« Gardez à l’esprit l’âge de vos père et mère et que cette pensée soit à la fois votre joie et votre inquiétude (EC 4,21) ».
« Le bon fils est celui qui, trois ans après la mort de son père, n’a toujours pas dévié du chemin que ce dernier lui avait tracé (EC 1,11) ».
Confucius disait aussi : «  Les délits prévus par le Code des 5 châtiments sont au nombre de 3000 mais la faute la plus grave ,c’est de manquer de piété filiale » (Xiaojing XI).
et : « La perfection de la piété filiale, c’est à 50 ans d’être toujours aussi respectueux envers ses parents »
(Mengzi VI).
Il était également essentiel de donner  à ses parents une descendance mâle afin de poursuivre le rite des ancêtres .
L’ainé bénéficiait d’un statut particulier . Enfreindre  l’ autorité de l’aîné , était considéré comme un crime contre la lignée des ancêtres. La primogéniture était déterminante car en cas de décès du fils aîné , c’était le fils de celui-ci et non un de ses frères  qui au cours des cérémonies  occupait la place la plus importante .
Dans la tradition juive le respect des parents est une obligation religieuse  majeure . « Honore ton père et ta mère afin que tu vives longtemps » dit le 5e commandement . Le respect des parents occupe une place essentielle dans le judaïsme. La Torah compare l’honneur dû aux parents à la crainte que l’on doit porter à Dieu lui-même. Il est interdit de prendre la place de son père ou de  le contredire .Le fils est tenu de  loger , nourrir et habiller ses parents dans le besoin. Il doit éviter de les irriter et savoir accepter leurs remontrances.
L’honneur dû aux parents s’étend dans les deux traditions au maître enseignant .


6 RESPECT DES MORTS ET CULTE DES ANCETRES

Le culte des ancêtres a pour but d’inscrire l’homme dans une descendance et dans une histoire. Honorer ses ancêtres ,c’est s’inscrire dans une continuité.  « Quand les morts sont honorés et que la mémoire des plus anciens ancêtres reste vivante, la force du peuple atteint sa plénitude » (EC1,9)
Le grand deuil que l’on devait observer à la mort de ses parents durait trois ans car un enfant ne quittait pas le giron de ses parents les 3 premières années de son existence. Confucius disait: « Les rites de deuil sont là pour fatiguer la douleur et après arrêter » , c’est-à-dire accompagner ceux qui partent et aider ceux qui vivent à repartir dans le mouvement de la vie . Dans l’animisme archaïque, les défunts étaient vécus comme des entités toutes puissantes qu’il fallait se concilier alors que la piété filiale  inverse ce rapport . Les défunts dépendent des vivants et non plus le contraire .
Lors d’une cérémonie en l’honneur de défunts, un des disciples de Confucius demanda si les morts avaient une existence réelle et pouvaient assister à cette cérémonie.  Confucius répondit qu’ il était impossible de savoir  si les défunts étaient présents mais que par contre il avait la conviction qu’il était très bénéfique pour les vivants  de se rassembler pour honorer un mort.
Dans la tradition chinoise ,le deuil durait 3 ans lorsqu’il était porté le fils pour son père, le fils pour sa mère si elle décédait après son père, le père pour son fils ainé, la mère pour son fils ainé , l’épouse pour son mari, la fille non mariée pour son père et le vassal pour son suzerain .Il était de 1 an quand il était porté le fils pour sa mère  si elle mourait avant son père , le mari pour sa femme, le neveu à la mort d’un oncle paternel,  la bru pour ses beaux-parents, une fille mariée pour ses parents, pour un frère et pour un grand-parent paternel. Pour les autres degrés de parenté la durée du deuil était plus courte.
Tous les 7 jours après le décès et ceci 7 fois , des prières et des offrandes étaient faites pour protéger l’âme du mort.

Les règles du deuil sont également très codifiées dans le judaïsme. Elles s’appliquent à 7 catégories de parents : le père, la mère, le frère ,la sœur, le fils, la fille et le conjoint.
 Pendant les sept jours  qui suivent l’inhumation, l’endeuillé doit respecter certains interdits et  ne pas quitter son domicile même pour vaquer à ses occupations .
 Les règles de deuil deviennent ensuite moins strictes et durent au total 30 jours , voire une année entière , dans le cas d’ enfants portant le deuil de leurs parents. Pendant cette période, il convient de s’abstenir de toute activité réjouissante et les orphelins doivent réciter trois fois par jour le Kaddich , prière à la mémoire de leurs parents. Une cérémonie à la mémoire du défunt a lieu 8 jours , 1mois , dans certaines communautés 3 mois et 11 mois après le décès .L’anniversaire du décès est ensuite régulièrement célébré chaque année.




7 AMOUR DU PROCHAIN

Confucius insiste sur le devoir d’humanité  (ren)avec en particulier de la bienveillance et de la tolérance pour son prochain.« La bienveillance est un élément caractéristique de l’humanité » .    A la question d’un de ses disciples lui demandant quel  était le mot le plus important pour guider toute notre vie , Confucius répondit : « la tolérance . Ce que tu ne voudrais pas que l’on te fasse , ne l’inflige pas à autrui »(EC15,24).  Il insistait beaucoup aussi sur l’importance de la  justice (yi) face au pouvoir en place . A une question sur l’attitude à avoir vis à vis de l’inimitié , Confucius conseillait de répondre à la vertu par la vertu et à l’inimitié par la rectitude.Il ne s’agissait donc pas de répondre au mal par le bien ni de tendre l’autre joue mais d’avoir une attitude équilibrée.
Dans la tradition chinoise, la réalité humaine n’est pas intrinsèque à la personne isolée mais se définit par rapport à l’autre dans le cadre d’une association hiérarchique de deux personnes : père/fils, frère aîné /frère cadet, mari /femme ,souverain /sujet .Le mot frère n’existe d’ailleurs pas en chinois. Il y a par contre un mot signifiant frère aîné哥哥(gege)  et un mot pour désigner le frère cadet 弟弟(didi. Il y a quelqu’un au dessus de nous à qui nous devons obéissance et respect et quelqu’un au-dessous de nous à qui nous devons protection et bienveillance . L’empereur lui-même était nommé fils du ciel et donc assujetti à l’autorité céleste .

 L’amour du prochain  occupe une place essentielle  dans le judaïsme. Ceci est explicitement écrit dans la Torah : « tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Lévitique 19 / 18). Un païen alla trouver le célèbre rabbin Hillel pour lui demander de lui enseigner toute la Torah alors qu’il ne se tenait que sur un pied.  Hillel répondit : « ce que tu détestes pour toi, ne le fais pas à autrui ; ceci est toute la Torah, le reste n’en est que le commentaire ».




8 LES EAUX AMERES DANS LA BIBLE ET SA VERSION CHINOISE POUR S’ASSURER DE LA FIDELITE DE SON EPOUSE

Certains thèmes se retrouvent avec quelques variantes dans les deux cultures comme le cérémonial des eaux amères qui nous servira d’exemple. Une simple boisson  bue lors d’un rituel très codifié permettait dans les deux traditions de s’assurer des sentiments ou de la fidélité de son épouse.
Au chapitre 5 du Livre des Nombres, le récit biblique se penche sur la question de la suspicion d’infidélité . L’homme était autorisé à soumettre son épouse au rituel des « eaux amères » : le grand prêtre faisait boire à l’épouse un mélange d’eau et de poussière dans lequel un parchemin contenant le nom de Dieu avait été réduit en poudre. Si  l’épouse soupçonnée était coupable elle était sensée succomber  mais si elle survivait à cette épreuve , elle était déclarée innocente. Le mélange d’eau, de poussière et d’encre était tout à fait inoffensif  encore que ce psychodrame pouvait certainement  être très éprouvant  pour l’intéressée . Cet acte avait surtout pour but de redonner une chance à un couple tourmenté par la suspicion et la jalousie. Un commentaire insiste sur le fait que l’effacement du nom de Dieu était considéré comme une très grave transgression mais que pour tenter de recréer la paix entre un homme et sa femme même le nom de Dieu pouvait être effacé.
La version chinoise ressemble étrangement à la précédente. Un empereur Han voulait offrir une concubine à l’un de ses fonctionnaires zélé  mais celui-ci refusa par crainte de rendre sa femme  jalouse. L’empereur convoqua l’ épouse et lui donna le choix entre accepter cette concubine  pour son mari ou boire du poison avec l’engagement que ,si elle mourait , son mari ne pourrait pas alors prendre une autre femme. L’épouse fit le choix de mourir et but le liquide supposé empoisonné .La solution ne contenait  en fait  que du vinaigre et  l’empereur avait voulu simplement par  ce moyen éprouver les sentiments de l’épouse.



9 ITINERAIRE DE VIE

Dans les 2 traditions chinoise et juive , l’étude et la recherche de la sagesse sont essentielles tout au long de la vie.
Confucius trace un itinéraire de vie à ses disciples (EC 2,4) :
« -A 15 ans ma volonté était tendue vers l’étude .
- A 30 ans j’ai pris position.
-A 40 ans je n’éprouvais plus d’incertitudes.
-A 50 ans je connaissais le décret céleste. A ce stade on ne se plaint plus du ciel et on n’ accuse plus les hommes . On ne se plaint plus de son destin. Les évènements extérieurs ne peuvent plus nous perturber car l’homme doit être affranchi des inquiétudes, de l’indécision et de la peur .
-A 60 ans j’avais l’oreille à l’unisson  en résonance avec le reste du monde et tous les humains.
- A 70 ans , en suivant les désirs de mon cœur ,je ne transgressais aucune règle car les principes supérieurs étaient  alors devenus des habitudes ».
Dans les Maximes des Pères (5,24) ,les étapes de la vie sont un peu moins optimistes et hélas plus réalistes pour l’âge avancé :
« -A 5 ans on doit commencer l’étude de la Bible
-A 10 ans  on doit commencer l’étude de la Mishna
-A 13 ans ,on est soumis à l’accomplissement des préceptes religieux
-A 15 ans on doit commencer l’étude du Talmud
-A 18 ans l’homme doit se marier
-A 20 ans on entre dans la vie active
-A 30 ans, c’est l’âge de la force
-A 40 ans celui de l’intelligence
-A 50 ans on est apte à donner des conseils
-A 60 ans on commence à se faire vieux
-A 70 ans on est un vieillard
-A 80 ans arrive la caducité
-A 90 ans on tombe dans la décrépitude
- A 100 ans on est comme mort, n’appartenant plus à ce monde . »




 Il semble donc exister des valeurs communes entre  les deux civilisations juive et chinoise malgré des contacts inexistants ou tout au plus indirects et très épisodiques . D’un côté  les Chinois sont un grand peuple majoritaire sur sa terre ,d’un autre côté les Juifs constituent un petit peuple souvent dispersé , minoritaire et persécuté. Pourtant  l’éducation, la transmission et le respect des traditions ont permis à ces deux peuples de traverser le temps en préservant leur identité .






dimanche 27 avril 2014

Le divorce dans les traditions chinoise et juive


Le divorce dans les traditions chinoise et juive    JP Derrida

Dans la tradition chinoise, selon le livre des Rites , un homme ne pouvait divorcer de  sa femme que dans 7 cas :
-si elle désobéissait à ses beaux-parents ou leur manquait de respect,
-si elle n’avait pas eu de fils,
-si elle commettait un adultère,
-si elle était jalouse empêchant que son mari ait une concubine,
-si elle volait,
-si était trop bavarde rompant l’harmonie familiale,
 -enfin si elle était atteinte d’ une maladie incurable .
Il ne pouvait  cependant plus la renvoyer dans 3 cas :
-      -si sa femme avait déjà pris le deuil  de 3 ans pour ses beaux-parents
-      -s’il était pauvre au moment du mariage et  était devenu riche ,
-     -si la femme n’avait plus de parent capable de la recueillir.
Pour concrétiser le divorce, l’homme  devait remettre à sa femme une lettre de divorce .
 Le mariage était une affaire familiale . Le choix  était fait par les parents et la vie conjugale était un devoir social . L’amour-passion paraissait trop éphémère et trop dangereux pour une institution aussi fondamentale que la famille. On se mariait pour  s'assurer une descendance et la pérennité du culte des ancêtres.





Dans la tradition juive le mariage peut être dissous par le divorce. L’homme, ne pouvait exiger le divorce  que dans 4 cas :
-      -si des défauts ou des infirmités graves, préexistants au mariage et inconnus de lui à ce moment-là, affectaient sa femme,
-       - si une maladie survenue pendant le mariage compromettait la vie conjugale ou mettait en danger la vie de l’époux,
-       -si durant dix ans de vie commune le couple n’avait pas eu d’enfants,
-       -si la femme se comportait sciemment de manière à nuire à son mari.
La Michna (Gittin 9,10) expose à propos de ce sujet  des opinions très différentes :
-selon l’école de Chammaï , seul un adultère commis par l’épouse constituait un motif de divorce ,
- selon l’école de Hillel , un homme pouvait répudier sa femme si elle avait laissé brûler son repas
-enfin, Rabbi Aquiba pensait que le divorce était justifié si l’homme avait trouvé une femme plus belle que son épouse.
La femme, de son côté, avait le droit, même si cette éventualité était beaucoup plus rare, de demander le divorce, et d’obtenir l’assentiment du tribunal rabbinique dans certains cas:
-une maladie contagieuse et/ou répugnante de son mari,
-un mari impotent ou stérile,
-le refus du mari de subvenir à ses besoins,
-le refus de lui accorder son devoir conjugal,
 -la violence physique ou verbale destinée à lui faire enfreindre des préceptes religieux,
-un mari qui dégage une odeur nauséabonde, liée en particulier à certains métiers,
-un mari qui part s’établir à l’étranger contre la volonté de la femme,
-un mari qui apostasie.
Le divorce pouvait donc être initié soit par l’homme, soit par la femme mais le document du guet, était écrit et signé
exclusivement par le mari  et devait être reçu par la femme pour que le divorce soit effectif.
 Ce document du guet ressemble étrangement à la lettre de divorce dans le rite chinois. L’époux  rendait ainsi sa liberté à son épouse lui permettant de refaire sa vie. Sans ce guet , tout enfant né d’une union avec un autre homme serait exclu de la communauté et aurait le statut peu enviable de mamzer.
  Si la femme était frappée d’un handicap mental ou n’était plus en mesure de veiller sur elle-même, son mari ne pouvait divorcer, car elle était considérée comme n’ayant pas la capacité  de recevoir le guet.

vendredi 18 avril 2014

Biermer


 La centenaire
Madame  C, grande bourgeoise de Neuilly, quasi centenaire vint me voir un jour pour un essoufflement anormal. Je l’examinai, trouvai un état cardio-vasculaire tout à fait acceptable et lui demandai un bilan biologique. À ma grande surprise elle avait une anémie macrocytaire majeure. Cette anomalie est en général due à un déficit en vitamine B 12. Je fis donc doser cette vitamine dont le taux était, sans surprise cette fois, complètement effondrée. Elle avait une maladie de Biermer très accessible au traitement.
Cette anémie et son déficit en vitamine B 12 étaient , me dit-elle, connus depuis longtemps et elle me montra des ordonnances   lui prescrivant depuis des années de fortes doses de Vitamine B12 orale , sans résultat significatif.
La maladie de Biermer n’est pas due à un manque de vitamine B12 orale mais à un déficit en facteur dit  intrinsèque produit par l’estomac  et qui permet l’absorption de la vitamine B12. Sans facteur intrinsèque, la vitamine B12 orale ne peut être absorbée. Je prescrivis donc à cette patiente de la vitamine B12  par voie intramusculaire. Son anémie se répara peu à peu, son état général s’améliora sensiblement. Elle reconnaissait ne pas s’être si bien sentie depuis des années. Elle eut même la gentillesse de m’inviter à son centième anniversaire en me présentant à la nombreuse assistance comme étant son sauveur.

Le silence du scientifique


Le silence du scientifique

 
 J’ai suivi pendant plusieurs années un charmant patient atteint d’une hypertension artérielle sévère. Je le voyais régulièrement tous les six mois ,mais un jour sa femme prit un rendez-vous urgent auprès de ma secrétaire, affirmant que le psychisme de son mari s’était rapidement détérioré, qu’il ne s’intéressait plus à rien, ne répondait plus aux questions et qu’il avait probablement une maladie d’Alzheimer évolutive.
Je le vis dès le lendemain et son comportement semblait effectivement s’être modifié. Après quelques formules de politesse j’essayai d’explorer ses fonctions cognitives : « Quelle date sommes-nous ? A quelle adresse vous trouvez-vous ? Quel est le président de la république ? » et quelques autres questions  élémentaires. Je ne pus obtenir aucune réponse et sa femme paraissait presque satisfaite que mon examen corrobore ses dires.
L’absence totale de réponse m’intrigua .Son examen clinique était normal .Il avait une formation d’ingénieur , était  un ancien polytechnicien et je me hasardai  à tester ses connaissances mathématiques :
- Quelle est la formule qui correspond à la somme des n premiers nombres ?  
- n x (n+1) /2 , soit 5050 pour les 100 premiers nombres , me répondit il presque confidentiellement.
-Quelle est l'identité d' Euler?
-  \mathrm e^{\mathrm i \pi} + 1 = 0 \ . enfin docteur c’est élémentaire ! 
Je  tentai une troisième question :
- Quelle est la probabilité de gagner au loto ? 
-Le Loto me répondit-il consiste à tirer 6 numéros parmi 49 .La probabilité de gagner et donc de 6 × 5 × 4 × 3 × 2 × 1 / 49 × 48 × 47 × 46 × 45 × 44, soit environ 7 chances sur 100 millions, c’est pour cette raison que les gagnants sont si rares. 
 - Prodigieux !  Mais, mon cher Monsieur, pourquoi ne répondez vous  pas aux questions plus simples et ne parlez vous plus à votre femme ?
- Parce qu' elle m’ennuie avec toutes ses questions stupides et que je ne supporte plus qu’on me prenne pour un imbécile . 

lundi 14 avril 2014

2 patientes dans ma salle d'attente


Madame Z avait eu bien des malheurs dans sa vie. Elle avait perdu toute sa famille pendant la shoah . Elle-même déportée à Auschwitz en 1944, était revenue  par miracle et s’était mariée avec un ancien déporté .De condition modeste elle travaillait dur sur les marchés . Elle avait eu un fils  adorable mais un peu retardé qui était parvenu à trouver un emploi protégé de jardinier à la mairie de Paris. Son mari était un grand cardiaque et elle m’appelait souvent en urgence à son domicile rue de Turbigo. Elle était à sa fenêtre , criant en m’apercevant: «  Venez vite ,mon mari va très mal ,par pitié docteur , sauvez le ». J’accourais et c’est vrai que ça allait souvent très mal . A cette époque l’hospitalisation en réanimation des personnes âgées  était difficile et de toute façon le patient refusait toute hospitalisation . Avec des diurétiques injectables , des nitrés ,j’arrivais à l’améliorer et la crise d’œdème pulmonaire  était jugulée. Ces épisodes étaient souvent provoqués par des écarts alimentaires car le hareng fumé n’est pas ce qui convient le mieux au régime sans sel.
Pour revenir à  notre histoire , Madame Z venait  également me consulter à mon cabinet et attendait dans ma salle d’attente arrivant toujours très en avance sur son heure de rendez-vous. C’était une femme simple, peut-être un peu dérangée par toutes les épreuves de la vie, parlant fort, essayant à tout prix pour se rassurer d’établir un contact avec les autres patients qui attendaient leur tour.
Un jour, je recevais la femme d’un distingué collègue ORL qui se plaignit pendant que je l’examinais de ce contact populaire dans ma salle d’attente et me demanda pourquoi , avec ma notoriété, j’acceptais de recevoir  des personnes si vulgaires et si peu policées. J’ai la réputation de toujours me contrôler vis à vis de ma clientèle mais cette fois c’était trop. Je lui répondis: «  la personne dont vous me parlez est une ancienne déportée ,elle revient de l’enfer et j’ai une très profonde affection pour elle . De plus c’est une cliente fidèle qui  m’honore de sa confiance et c’est justement grâce  à elle que je peux recevoir gracieusement  depuis des années des patientes comme vous. ». Elle grimaça et je n’eus plus jamais de ses nouvelles .

3 Enigmes



1ère énigme:
  Dans un groupe se réunissant, à partir de combien d’amis y a-t-il  une chance sur deux  que deux personnes aient le même anniversaire?
La réponse est 21
Car 1/2 = 1 x (364:365)  x  (363:365)  x (362 :365)…..x ( 365 -21) :365
A partir de 21 personnes présentes, il y a donc 1 chance sur 2 que 2 personnes aient le même anniversaire . Il est évident que plus le nombre de personnes est élevé, plus grande est la chance d’en trouver 2 avec le même anniversaire. Vous pourrez vérifier  ce calcul si vous faites  partie d’un groupe de plus de 20 personnes .



2ème énigme :
Un vol est commis dans une maison  et le maître décide d’enduire de suif  son coq réputé être très intelligent. Chaque suspect devait à son tour entrer seul dans une pièce et caresser le coq. Le maître affirmait que dès que le voleur toucherait le coq celui-ci se mettrait à chanter. Le coq ne chanta pas car aucun coq ne chante pour démasquer un voleur, vous le savez bien, et pourtant grâce à ce stratagème, le maître a pu démasquer le voleur.
-Comment ?
-Simplement en regardant les mains sales pleines de suif de ceux qui avaient caressé le coq; seul le voleur qui avait eu peur que le coq ne le reconnaisse avait les mains propres.

3ème énigme:
Deux amis se rencontrent  et l’un demande à l’autre des nouvelles de sa famille.
«- J’ai 3 filles, dit-il, et le produit de leur âge est  36.
-Je ne vois pas, dit l’autre.
-La somme de leur âge est égale au numéro de la maison d ’en face.
-Je ne vois toujours pas.
-L’aînée est blonde.
-Très bien, j’ai maintenant trouvé la solution: 9 ,2 et 2  évidemment.»

samedi 5 avril 2014

你的聪明和我的样子


这个故事让我想一个故事有一点相像。姑娘 有一个不好看鼻子 ,小伙子 不能走路 。 我最喜欢讲一个真实 的故事 。
第二世界的战争以前 有 一位很著名的 法国 哲学。有很多 人们 什么时候他教授。几个 小时以前开始课 人倒了。有 哲学生 也别人 要表演 。
有一天 在 下课,一个非常美丽姑娘 向老师走来 ,说:
-姑娘 : 教师,教师, 我爱你, 我有一见钟情。 我 要跟你 一起 做一个 孩子。
-教师 :走马观花。你是多么漂亮,多么年轻。 我六十岁, 你二十五岁。我比你爸爸大。年轻小姐跟老年人 没有意思。
-姑娘 : 不管你二十岁还是六十岁,我都爱你。 如果我们孩子 有你的聪明和我的美 就他是一个特殊的孩子
-教师 : 你想 过这是怎样 的孩子 如果他有你的聪明和我的美吗 ?

脸白还是 黑 ?


中国人觉得 黑  漂亮
西方 晒黑 更漂亮 可是 从前 不是一样 的
1914 以前 ,高 应该 有一张
只有工作耕地 民才 晒黑的
18 19 纪 的绘画 夏天 贵妇都 (例如 Monet)
Le Fouquets   Champs Elysées 的右边 为了平台上 没 有  太阳 。
为什么  选择 脸白 还是 脸黑 可能 黄种人最好看?